Quand, faisant (tardivement) mes débuts
en informatique, je me hasardai à interroger l’oracle
de Google pour la première fois, le nom de Notre Dame des
Vertus vint spontanément sur mon clavier. Il s’inscrivait
très naturellement dans le cadre des recherches d’anthropologie
religieuse que je menais alors de la façon la plus classique.
Souhaitais-je avoir la confirmation
de ce que m’avaient déjà appris mes longues
heures de documentation en bibliothèque ? Pour l’humour
de ce qui va suivre, je croyais la dévotion à la
Vierge sous le vocable des Vertus, spécifique de la région
parisienne. Ou était-ce un appel à aller au-delà
? Je pense que les deux étaient vrais.
En tout cas, je cliquai, et mon
interrogation partit dans l’océan de tous les savoirs,
rejoindre celles posées à la même seconde
par les autres internautes de la planète.
Ne faut-il pas admirer que, de
cette infinité de questions secouées entre les vagues
des millions d’informations que le moteur brassait surhumainement
pour nous, il en soit sorti quelque chose ? Or, à l’instant
où me parvint la réponse de l’ordinateur,
mes certitudes concernant la dévotion spécifique
de la région parisienne volèrent en éclats.
Car, de Bretagne, de Picardie,
de Lorraine, de la Côte d’Azur, des Alpes, du Languedoc,
je voyais converger des Notre Dame des Vertus insoupçonnées,
toutes plus passionnantes et imprévues les unes que les
autres, et souriant de la naïveté que j’avais
eue de croire qu’il n’y avait de Notre Dame des Vertus
qu’à Paris. Ce fut encore pire quand je m’avisai
de poser ma question en d’autres langues. Je redécouvris
même l’Amérique.
Ce qui me fascinait aussi, c’était
l’incroyable variété de mes sources d’information,
et l’intensité de la vie qui s’en dégageait.
Universités et bibliothèques, mais aussi sites diocésains,
paroissiaux, municipalités, offices de tourisme, éditoriaux
de journaux en ligne, annonces de clubs sportifs ou d’héraldique,
établissements scolaires, coopératives agricoles,
cartes de chemins de grande randonnée, sites perso, inventaires
de lavoirs anciens ou de clochers régionaux, Journées
du Patrimoine, calendriers de fêtes …
Mais le plus extraordinaire de
la recherche sur Internet reste son caractère de pêche
miraculeuse. J’ai espéré et recueilli avec
le même émerveillement, chacun des noms de lieux
que vous trouverez dans mon inventaire. Un clic après l’autre,
ils me sont parvenus, en réponse à ma question inlassablement
répétée. Pas tous les jours, quelquefois
même à de longs intervalles. Je n’interrogeais
pas non plus de façon régulière. Cela me
reprend par périodes, de ne pas résister à
la tentation de relancer mes filets. Le nom le plus récent
m’est arrivé du Portugal il y a deux jours. Sans
se faire annoncer. Gratuit comme un don et précieux comme
un trésor.
Bien sûr, ce qui vous est
révélé n’est qu’une remise en
mouvement d’une information localement bloquée, et
doit se prolonger par une vérification sur documents, ou
par mails, ou directement sur les lieux où l’on découvre
des gens charmants, qui partagent tous fraternellement la même
illusion que leur Notre Dame des Vertus est la seule. Et
sincèrement, ils n’ont pas tort, car chacun de nous
est le centre de son monde.
Ils ont aussi un autre point commun,
qui me les rend également chers. Car, au-delà de
leurs différences de pays, générations, classes
sociales, cultures, opinions et croyances, et sans se connaître
ni s’être concertés, ils se sentent tous investis
d’une responsabilité patrimoniale vis-à-vis
des lieux de mémoire de leur Notre Dame des Vertus.
Et cela console pour les endroits où, le plus souvent par
ignorance, on l’a déjà laissée s’effacer.
A l’heure actuelle, j’ai
recensé plus d’une centaine de lieux dans le monde
qui sont ou ont été concernés par la dévotion
à la Vierge sous le vocable spécifique de Notre
Dame des Vertus. A travers les aléas historiques, nombre
de chapelles de pèlerinage, églises, statues, peintures
lui ont été ou lui sont encore dédiées.
Mais, parce que la dévotion sous ce vocable est très
ancienne et souvent recouverte par d’autres ou même
oubliée, et parce qu’elle a traversé beaucoup
d’événements tragiques, sa mémoire,
plus que d’autres peut-être, nous est parvenue comme
éclatée.
Avec ce site, j’ai essayé
de lui rendre une partie des contours perdus de son universalité.
Denise Homerin-Barberon
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